• Chapitre 1 : Peeves et Keera

    Alors que Percy les menait vers la Tour de Gryffondor, les nouveaux lions tombèrent nez à nez avec une étrange apparition.
    Les yeux cachés sous une frange grossière d'un blanc nacré et les jambes repliés sur son petit corps frêle, une petite fille était adossée contre une colonne de pierre. Elle semblait avoir passé toute sa courte vie là, sans bouger, son souffle troublant à peine l'immobilité de sa position. Son visage pâle et usé était posé sur ses genoux, ses lèvres dessinant une moue cruelle. Elle avait l'air si méchante que Neville sursauta en la voyant apparaître dans le tournant.
    - Qui est-ce ? Interrogea Harry.
    - Je ne sais pas vraiment, admit-le préfet. Je sais seulement qu'elle s'appelle Keera, mais autrement …
    Une canne apparut soudain sous le nez de Percy et manqua de le renverser. D'autres suivirent, se précipitant sur les nouveaux élèves, à la grande satisfaction de la petite fille qui esquissa un sourire carnassier.
    - C'est Peeves, parvint à murmurer Percy lorsqu'elles disparurent. Un esprit frappeur. Lui et Keera sont toujours de mèches pour faire des bétises.
    Harry jeta un coup d'œil à la petite fille, qui était redevenue aussi immobile que du marbre. Sa figure blême avait désormais prit une teinte rosée. Percy lança un regard noir dans sa direction, puis gronda, élevant la voix :
    - Peeves, montre-toi.
    Le spectre apparut juste au-dessus de Keera. Il avait un drôle d'air, qui rappela à Harry les peintures historiques de l'époque napoléonienne, le chapeau à clochettes en plus. Il avait une cravate orange autour du cou, et ne portait pas de chaussures. Il portait un justaucorps marron, avec une grande veste qui lui tomberait jusqu'au genoux, si tant est qu'il prendrait le temps de se mettre debout.
    Il se jeta sur Hermione en caquetant, mais un petit geste imperceptible de Keera lui fit changer d'avis. Il préféra donc repartir en lâchant ses cannes sur le pauvre Neville, faisant cliqueter des armures sur son chemin. La petite fille prit la même direction que lui, calmement.
    - Ces deux-là, le jour où il ne seront plus ici, tout le monde se sentira beaucoup mieux, grinça Percy, les yeux tournés vers le couloir où ils avaient disparus.
    Il reprit le chemin tout en leur expliquant qu'il fallait se méfier de Peeves, comme tout bon préfet qu'il était.

    Ils revirent plusieurs fois la petite fille, à plusieurs endroits totalement différents : en sortant d'un cours de potion, avant de renter dans leur salle commune, au bord du Lac, et Hermione leur raconta même l'avoir vue dans les toilettes des filles. Ce qui paraissait pourtant logique, mais les quatre enfants – Harry, Ron, Hermione et Neville – étaient persuadés que, comme Peeves, elle n'était ni tout à fait vivante, ni tout à fait morte.
    Un jour, alors qu'ils discutaient de leur dernier cours de Métamorphose, où ils avaient appris un sortilège des plus intéressants, assis en rond dans l'herbe du parc, Keera surgit, le visage toujours fermé à toute émotion. Elle portait une blouse rouge et or, symbole de gryffondor, une cravate aux couleurs de serpentards, un bonnet poufsouffléiens, ainsi qu'une écharpe bleu et argent. Derrière elle surgirent quatre élève, un de chaque maison ; ils avaient chacun perdus un vêtement, et il était facile de deviner que c'était ceux que Keera portait.
    Curieusement, à sa place, n'importe quel élève aurait eut un sourire gigantesque, s'étirant jusqu'au oreilles. Mais Keera était la plus sérieuse possible. Les lèvres pincés et les yeux mi-clos, comme ils avaient l'habitude de la voir. Ils ne purent se retenir de rire, malgré la crainte que leur inspirait cette étrange petite fille. Mais lorsque le professeur McGonagall surgit à son tour, se précipitant vers les quatre élèves pour leur les arrêter, une lueur horrifiée dans les yeux, ils s'interrompirent. Son chapeau était de travers, et elle tenait sa baguette magique à la main. Apparemment, il ne s'agissait pas d'une banale farce.
    Malheureusement, ils n'en surent pas davantage, car elle entraina les quatre élèves à l'intérieur en chuchotant, et personne n'osa les suivre – même discrètement - pour en apprendre plus …

    Ils la revirent plusieurs fois, adossée à cette même colonne où il l'avait vue la première fois. Ils évitaient soigneusement de passer à côté, mais ils purent difficilement faire autrement, car la colonne en question n'était qu'à quelques pas seulement de la Grosse Dame ; et toute les fois où ils la voyaient, qu'ils soient à trois, à quatre, à cinq, à six ou en troupeau, toujours, Keera avait ce même regard froid et méchant, cette moue cruelle et ses cheveux en bataille.
    Un jour, pourtant, après bien des mois passés à l'école [pour situer mes lecteurs : un peu avant la colle de Harry, Hermione, Neville et Drago dans la forêt interdite] il se passa quelque chose d'extraordinaire. Neville avait dut passer seul devant Keera, et avait même sortit sa baguette pour l'occasion, bien qu'Harry soupçonna que ça ne serve pas à grand-chose. Il s'apprêtait à tourner, juste avant d'entrer dans le champ de vision de la petite fille, lorsqu'il entendit une voix horriblement familière, qui discutait avec une voix étrangement plate et faible. Il s'arrêta, surpris, et voici ce qu'il entendit :
    - Oh ! Ce doit être amusant de protéger la Pierre. N'est-ce pas petite Keera ? J'aimerais beaucoup participer à ton piège, tu sais ! Il a l'air vraiment très astucieux !
    - Peeves, parle moins fort. Quelqu'un nous écoute.
    - Ah oui ?
    Peeves surgit juste au dessus de Neville en ricanant, et le petit garçon se mit à courir en sens inverse, hurlant à pleins poumons. Il dérapa dans les escaliers, puis tomba finalement sur Harry et Ron. Bien sûr, comme il était arrivé devant eux alors qu'il était sur la dernière marche des escaliers, il ne put s'arrêter et entraîna les deux autres garçons dans sa chute.
    - Neville ! S'exclama Ron, outré.
    - Pe … Peeves ! Bégaya-t-il en pointa un doigt potelé vers le haut des escaliers.
    Mais il n'y avait personne d'autre que quelques élèves, qui descendaient calmement les marches. L'esprit frappeur n'avait pas même prit la peine de le poursuivre. Ron continua de rouspéter, mais Harry vit tout de suite que malgré la peur légendaire de Neville, il y avait quelque chose de différent.
    - Neville, qu'est-ce qui s'est passé ?
    - Je … Peeves parlait au zombie, parvint-il à articuler. Et elle savait que j'étais là !
    - Et que disais t-il ?
    - Je ne sais plus trop … Il parlait d'une Pierre, et …
    Mais il n'eut même pas le temps de finir. Harry et Ron l'entraînèrent en coup de vent dans le parc, là où ils savaient que se trouvait Hermione. Ils la virent assise avec un gros livre sur les genoux, et se précipitèrent vers elle. Neville les suivait, hébété et incapable de comprendre ce qui lui arrivait.
    - Hermione ! Keera a parlé de la Pierre ! Lâcha Harry lorsqu'ils furent suffisamment près d'elle.
    La jeune fille fronça les sourcils.
    - En est-tu sûr ?
    Neville hocha la tête vigoureusement. Il ne comprenait toujours rien, mais il avait subitement l'impression d'avoir pris de l'importance.
    - Alors … ce n'est pas Rogue qui veut s'en emparer, conclut-elle.
    Ils expliquèrent alors à Neville toute l'étendue du problème, et ses yeux s'agrandirent au fur et à mesure que le récit avançait.
    - Mais Peeves ne parlait pas de la voler. Il disait que …
    Il resta pensif un instant, tachant de reconstituer ce que l'esprit avait dit.
    - Ah oui ! Il disait « que ça s'rait marrant de protéger la Pierre. ».
    Satisfait, il jeta un œil au trois autres, qui semblaient un peu surpris. Finalement, ce fut Ron qui rompit le silence :
    - Ça veut dire qu'on doit aller lui parler.


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